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Pays-Bas

Appellation désignant depuis le XIe s. les régions de l'Escaut, de la Meuse et du Rhin inférieur, soit les P. actuels et la Belgique. Aux XIVe et XVe s., les ducs de Bourgogne unifièrent les territoires sis entre la Somme et l'Ems. Après les guerres de Bourgogne, les P. revinrent aux Habsbourg, puis à leur branche espagnole lors du partage qui suivit la mort de Charles Quint (1558). L'opposition au centralisme du roi d'Espagne et la revendication de la liberté confessionnelle pour les protestants déclenchèrent la guerre d'indépendance, dite guerre de Quatre-Vingts Ans (dès 1568). En 1579, les sept provinces du Nord formèrent l'Union d'Utrecht et se séparèrent des provinces catholiques ou recatholicisées du Sud (la future Belgique). Sous le nom de Provinces-Unies, elles obtinrent leur indépendance au traité de Westphalie (1648); elles auront à la défendre contre la France de Louis XIV et contre l'Angleterre (quatre guerres commerciales). La Constitution républicaine laissait une large autonomie aux provinces. Celles-ci envoyaient des délégués aux Etats généraux, institution centrale siégeant à La Haye. La fonction de stathouder ("lieutenant") revint de manière quasi héréditaire à la maison d'Orange. Le XVIIe s. fut le "siècle d'or" des Provinces-Unies; la Compagnie des Indes orientales et, dans une moindre mesure, celle des Indes occidentales, avec leurs réseaux commerciaux internationaux, les firent accéder au rang de puissance coloniale. Au XVIIIe s., elles subirent un certain déclin politique et économique et perdirent de leur influence en Europe. Les provinces du Sud passèrent en 1713 des Habsbourg d'Espagne à ceux d'Autriche.

La République batave instituée en 1795 après la conquête des Provinces-Unies par la France devint en 1806 le royaume de Hollande, confié à Louis Bonaparte (frère de Napoléon), puis incorporé à l'Empire en 1810. Le congrès de Vienne créa le Royaume-Uni des P. (provinces du Nord et du Sud), sous Guillaume Ier d'Orange-Nassau, mais la politique des langues, les oppositions confessionnelles et le fort sentiment national des provinces du Sud conduisirent à la sécession de la Belgique en 1830. Les réformes libérales entreprises en 1866-1868, sous Guillaume III, firent des P. une monarchie constitutionnelle. Le suffrage universel masculin, puis féminin et le système proportionnel furent introduits entre 1917 et 1919. Le royaume resta neutre pendant la Première Guerre mondiale. En 1920, il adhéra à la Société des Nations. Malgré sa stricte neutralité, il fut occupé en 1940 par les troupes allemandes; il sera libéré par les Alliés en 1944. Dans l'après-guerre, il renonça à la neutralité, rejoignit le camp occidental (membre fondateur de l'Otan) et participa à l'unification européenne. A l'époque de la décolonisation, les P. perdirent la majeure partie de leur empire (indépendance de l'Indonésie en 1949, du Suriname en 1975), ne gardant que quelques îles dans les Petites Antilles (Antilles néerlandaises, dissoutes en 2010).

Epoque moderne

Relations culturelles

Des contacts se sont noués dès le XVe s., par la route du Rhin, entre les P. et les villes confédérées, d'abord surtout Bâle, où furent recteurs de l'université Otto Klingen, d'Utrecht, en 1472 et Andreas Oudorp, d'Alkmaar, en 1484 et 1491. Environ 400 étudiants néerlandais s'immatriculèrent à Bâle entre 1532 et 1676, surtout en droit et en médecine; quelques-uns d'entre eux, tel Johannes Acronius, y enseignèrent ensuite. Erasme de Rotterdam y fut attiré par les imprimeurs; il y rencontra Zwingli en 1516. André Vésale, de Bruxelles, y étudiait quand il publia chez Jean Oporin son fameux De humani corporis fabrica (1543). C'est aussi à Bâle que parut l'édition de l'encyclopédie d'Isidore de Séville due à Bonaventura Vulcanius, de Bruges.

Cornelis Hoen, avocat à La Haye, influença la doctrine de Zwingli, qui, diffusée aux P. par Hinne Rode, inspira à son tour la confession de foi des prédicants de Frise orientale (1528), le premier texte zwinglien rédigé hors de Suisse. Bâle accueillit des personnalités pourchassées pour cause de religion, tel l'anabaptiste David Joris (incognito). Le Hausbuch (recueil de sermons, dit aussi Decades) de Heinrich Bullinger, traduit en 1560, connut dix rééditions aux P. entre 1563 et 1622. On imprima en néerlandais, en 1644, la Confession de foi de Zurich (1545) suivie de la Fidei expositio de Zwingli, puis en 1724 et 1736 la Confessio helvetica posterior.

Vers 1570, l'influence de Zurich recula face à celle de Genève auprès des réformés néerlandais, surtout dans la confrontation entre le modèle zwinglien d'Eglise d'Etat et la conception presbytéro-synodale du calvinisme qui mettait l'accent sur l'autonomie de l'Eglise (controverse de Leyde entre Caspar Coolhaes et le Genevois Lambert Daneau, 1581-1582). Jacobus Arminius, fondateur des remontrants, qui refusait la doctrine calviniste de la prédestination, avait étudié à Genève et Bâle (1582-1584), tout comme le "contre-remontrant" Caspar Heidanus. Près de 300 Néerlandais s'immatriculèrent à l'académie de Genève à l'époque de Théodore de Bèze, notamment Philippe de Marnix de Sainte-Aldegonde, Ubbo Emmius et Guy de Brès, auteur de la Confessio belgica de 1561. Une version néerlandaise de l'Institution de la religion chrétienne de Calvin parut en 1560. Des collectes organisées aux P. en faveur de Genève et de son académie (années 1590), puis de ses fortifications (XVIIe s.) rapportèrent des sommes considérables.

L'orthodoxie des "contre-remontrants" l'emporta dans la question de la double prédestination au synode de Dordrecht (1618-1619). Les protestants suisses (représentés par des personnalités comme les antistès de Schaffhouse et de Zurich, Hans Conrad Koch et Johann Jakob Breitinger) en adoptèrent les conclusions, reprises encore dans la Formula Consensus de 1675. Breitinger fit célébrer en 1619 l'heureuse issue du synode par un jour de jeûne et de prière, en s'inspirant, dit-on, d'un modèle hollandais. Quelques ecclésiastiques catholiques suisses (Nicolas Dufour par exemple) travaillèrent dans les P. du Sud, tandis que le Flamand Thomas Henrici fut membre du chapitre cathédral et évêque auxiliaire de Bâle.

Le jeune prince Guillaume Frédéric d'Orange-Nassau vers 1790, aquatinte en couleurs, dans le Cahier vert de Benjamin Samuel Bolomey (Musée historique de Lausanne).
Le jeune prince Guillaume Frédéric d'Orange-Nassau vers 1790, aquatinte en couleurs, dans le Cahier vert de Benjamin Samuel Bolomey (Musée historique de Lausanne). […]

Dans la seconde moitié du XVIIe s., Bâle perdit rapidement son attrait pour les étudiants néerlandais (dernière immatriculation en 1676), tandis que les protestants suisses se mirent à fréquenter les universités récemment fondées aux P. (près de 700 personnes, surtout de Berne, Zurich, Genève et Lausanne), à commencer par Leyde (François Turrettini, Lukas Gernler, Samuel Frisching, Anton Klingler, Jacques Bernoulli en 1682, Laurenz Zellweger). Johann Heinrich Hottinger (1620-1667) fut appelé à Leyde, où il avait étudié, comme professeur en 1667, de même que Friedrich Spanheim en 1642. Albert de Haller y étudia la médecine et fut l'élève notamment de Herman Boerhaave (dès 1725). Breitinger et Koch (les futurs délégués au synode de Dordrecht) étudièrent à Franeker, Hans Caspar Escher (1678-1762) et le naturaliste Johann Jakob Scheuchzer (1672-1733) à Utrecht. Jean Bernoulli fut professeur de mathématiques à Groningue de 1695 à 1705. Maints étudiants découvrirent aux P. les œuvres d'auteurs controversés comme Grotius, Descartes, Hobbes et Spinoza. Au début de l'époque des Lumières, les modes hollandaises, et non seulement françaises, influencèrent la vie de société (salons, lecture du Mercure politique). Dans le domaine des relations artistiques, on peut citer l'importation de tapisseries flamandes au XVe s. déjà. Le peintre Jan Hackaert travailla pour les Werdmüller à Zurich, où il influença fortement son collègue Conrad Meyer (1618-1689). Plusieurs artistes, tel David Herrliberger, se formèrent aux P. Quelques orfèvres s'inspirèrent de motifs néerlandais, de même que les médaillistes genevois Dassier. Benjamin Bolomey, portraitiste de la famille du stathouder Guillaume V, fut directeur de l'académie de peinture de La Haye, où il vécut de 1763 à 1791.

Relations politiques et diplomatiques

Le chevalier uranais Walter von Roll à la tête des troupes catholiques de Suisse centrale en route pour les Pays-Bas en 1574. Dessin à la plume aquarellé dans l'un des vingt-quatre volumes manuscrits de la chronique du chanoine Johann Jakob Wick (Zentralbibliothek Zürich, Handschriftenabteilung, Wickiana, Ms. F 23, fol. 40r).
Le chevalier uranais Walter von Roll à la tête des troupes catholiques de Suisse centrale en route pour les Pays-Bas en 1574. Dessin à la plume aquarellé dans l'un des vingt-quatre volumes manuscrits de la chronique du chanoine Johann Jakob Wick (Zentralbibliothek Zürich, Handschriftenabteilung, Wickiana, Ms. F 23, fol. 40r). […]

Adam Petri imprima en 1575 à Bâle son histoire du soulèvement des P. contre les Espagnols. Lors de la guerre d'indépendance, de petits groupes de Suisses servirent sans autorisation dans l'armée de Guillaume d'Orange, tandis que des mercenaires catholiques combattirent du côté espagnol, par exemple sous les ordres de Walter von Roll. Si l'auteur anonyme du dialogue Emanuel-Erneste (1580) considère que le régime politique des Suisses fiers et libres ne convient pas aux Néerlandais amollis et obséquieux, celui d'un Discours de 1583 sur les meilleures formes de gouvernement recommande l'adoption aux P. de l'imperium mixtum suisse. Dans l'autre sens, la réforme militaire imposée par la maison d'Orange inspira les nouveaux règlements de service des villes protestantes de Berne (règlement d'exercice de 1615, réforme de l'armée de 1628), Zurich (réformes du colonel Georg von Peblis en 1629, Kriegs-Büchlein de Johann Konrad Lavater en 1644) et Genève, et même de la ville catholique de Fribourg. Les maisons de correction envisagées vers 1630 à Berne et Zurich pourraient avoir leur modèle dans le nouveau Tuchthuis d'Amsterdam. Hans Conrad Heidegger reprend, parfois mot à mot, la Politica du néostoïcien Juste Lipse dans son traité Regentten Kräntzli (1632).

Les relations diplomatiques débutèrent avec Pieter van Brederode qui, après ses études à Bâle, devint en 1618 envoyé des Provinces-Unies auprès de la Confédération. Pendant le congrès de Westphalie, le bourgmestre de Bâle Johann Rudolf Wettstein, délégué des cantons protestants, observa attentivement la manière de négocier des Néerlandais, qui, comme les Suisses, se séparèrent de l'Empire en 1648. Le Schaffhousois Johann Jakob Stokar tenta en vain, en 1653, sur mandat des cantons protestants, de négocier une paix entre l'Angleterre et les Provinces-Unies, puissances maritimes rivales, quoique de même confession. Rudolf van Ommeren mena en 1655-1656 des tractations sur un soutien aux vaudois du Piémont et sur une assistance (qu'il ne put accorder) aux cantons protestants lors de la première guerre de Villmergen. En 1665-1666, à la veille de la guerre de Dévolution entre la France et l'Espagne, il demanda sans succès le droit d'enrôler des mercenaires contre l'évêque de Münster.

Pendant la guerre de Hollande (1672-1678), le résident des Provinces-Unies à Bâle, Abraham Malapert, et le comte Friedrich von Dohna protestèrent sans grand effet contre la présence, contraire aux capitulations, de troupes suisses du service de France dans les armées qui avaient attaqué les P. Les efforts des Hollandais pour lever eux-mêmes des régiments échouèrent, même si des écrits comme L'affermissement des republiques de Hollande & de Suisse (1675) présentaient les descendants de Guillaume Tell et de Guillaume d'Orange comme des alliés; il y eut tout au plus quelques engagements individuels. La politique expansionniste de Louis XIV, mais surtout la Révocation de l'édit de Nantes en 1685 et l'expulsion en 1686 des vaudois du Piémont par le duc de Savoie éveillèrent, du moins chez les protestants, le sentiment d'une menace commune. En 1689-1690, les Provinces-Unies envoyèrent en Suisse le huguenot Gabriel Convenant et le Schaffhousois Johann Ludwig Fabricius, professeur à Heidelberg, pour s'occuper du retour des vaudois en Savoie; Convenant participa aussi à l'épisode militaire de la Glorieuse Rentrée des vaudois.

Son successeur, Petrus Valkenier, conclut en mars 1693 avec Hercules Capol (de Flims, docteur en médecine à Leyde en 1665) une capitulation privée qui lui permit de lever officiellement aux Grisons un nouveau régiment de 1600 hommes. La même année, Zurich autorisa le recrutement de 800 hommes. Berne (en 1696), Schaffhouse, Neuchâtel et Genève donnèrent des accords analogues. En 1700, 11 200 Confédérés étaient au service de Hollande; ils participèrent à la guerre de Succession d'Espagne et se trouvèrent, par exemple à la bataille de Malplaquet (1709), face à des compatriotes au service de France. Valkenier s'intéressa aussi au sort des vaudois et à celui des anabaptistes chassés de Berne et de Zurich, tels les 340 réfugiés bernois qui reçurent en 1711 l'aide de mennonites néerlandais.

En 1712, Berne signa avec les Provinces-Unies une alliance perpétuelle; François-Louis de Pesmes de Saint-Saphorin obtint en 1714 des troupes capitulées, tandis que les Hollandais promettaient des secours en argent en cas d'attaque contre Berne. Les III Ligues conclurent en 1713 une alliance défensive avec les P., malgré l'opposition des communes catholiques. La capitulation de 1748 avec tous les cantons protestants (sauf Bâle), Glaris, Appenzell Rhodes-Extérieures, Saint-Gall et Neuchâtel porta à 20 400 l'effectif des troupes suisses au service de Hollande (un régiment de gardes et quatre régiments de ligne). Les Suisses qui combattirent au service des provinces du Sud furent moins nombreux. Neuchâtel autorisa encore en 1781 la levée d'un régiment colonial pour la Compagnie des Indes orientales. Les troupes suisses furent licenciées après la fondation de la République batave en 1795.

Relations économiques

La Confédération se trouvait sur l'axe reliant par le Rhin les centres économiques des P. à l'Italie. Elle était aussi un (modeste) débouché pour les exportations néerlandaises, surtout de textiles et de denrées coloniales. Des marchands hollandais participèrent en 1625 au projet d'Henripolis, ville qui aurait dû être fondée près de Neuchâtel pour relancer le commerce international mis à mal par la guerre de Trente Ans. A Bâle, des immigrés hollandais s'intéressèrent à la passementerie; mais celle-ci dut surtout son essor au métier permettant de tisser plusieurs rubans de soie simultanément, dont le premier fut importé de Hollande en 1667 par Emanuel Hoffmann. Les exportations de textiles suisses (toiles, cotonnades) aux P. commencèrent au XVIIIe s.

L'industrie textile est à l'origine de relations commerciales et financières menées notamment par la banque protestante genevoise et par la maison saint-galloise Högger, active à Amsterdam. Paul Ivan Högger (1760-1816) fut président de la Banque de Hollande. L'Etat de Berne souscrivit au XVIIIe s. à des emprunts des provinces de Hollande et de Frise. Il plaçait ainsi sa fortune tout en affaiblissant la France.

XIXe et XXe siècles

Relations diplomatiques

Après l'épisode napoléonien, le Royaume-Uni des P. institua en 1814 une représentation diplomatique à Berne (transformée en consulat général en 1832). En 1815, la Diète décida, pour des motifs politiques et économiques, d'établir un consulat à Amsterdam. Un second consulat suivit à Rotterdam en 1847. Les P. ouvrirent une légation à Berne en 1894. En 1904, le Conseil fédéral fit accréditer aux P. son ministre à Londres, puis il institua une légation suisse à La Haye (1917), notamment parce qu'il souhaitait obtenir un siège au Conseil administratif de la Cour permanente d'arbitrage fondée en 1899. La Suisse entretint des consulats à Batavia (auj. Jakarta, Indonésie) dès 1874 et à Medan (Sumatra, auj. Indonésie) dès 1917. Pendant la Première Guerre mondiale, elle représenta les intérêts des P. en Russie. Le Conseil fédéral dut fermer jusqu'en 1945, sur pression du ministère allemand des Affaires étrangères, la légation de La Haye en 1940, le consulat de Rotterdam en 1941 et celui d'Amsterdam en 1942, tout comme, sur ordre des occupants japonais, ceux de Batavia et Medan en 1942. Pendant la guerre, la Suisse exerça des mandats de puissance protectrice pour le compte des P. en Chine (officiellement), en Bulgarie et en France (de facto). En 1957, les deux pays élevèrent leurs légations au rang d'ambassades (à Berne et à La Haye); il existe en outre, au début du XXIe s., des consulats néerlandais à Bâle, Genève, Lugano et Zurich, des consulats généraux suisses à Amsterdam et Rotterdam, ainsi que des consulats à Oranjestad (Aruba) et Willemstad (Antilles néerlandaises). La Suisse dispose aussi d'une mission à La Haye auprès de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques.

Déplacements personnels

Bien que le roi des P. ait dénoncé en 1829 la dernière capitulation (conclue en 1814-1815 avec des cantons protestants et catholiques) et bien que la Confédération ait interdit le mercenariat en 1859, un certain nombre de Suisses servirent aux XIXe et XXe s. dans les troupes coloniales néerlandaises. Au XIXe s., les émigrants suisses se rendant outre-mer (en particulier dans les colonies des P.) passaient souvent par les ports d'Amsterdam ou Rotterdam.

Parmi les Néerlandais voyageant en Suisse (nombreux déjà au début du XXe s.), on trouve la famille royale. En 1926, la République de Genève offrit à la princesse Juliana un extrait d'état civil qui confirmait sa qualité de citoyenne de Genève. Au XXe s., la colonie suisse aux P. se renforça. En 2008, on comptait 7076 Suisses vivant aux P. et 17 788 Néerlandais en Suisse.

Relations économiques

Les échanges commerciaux entre les P. et la Suisse s'intensifièrent au XIXe s., favorisés par l'aménagement du Rhin, rendu navigable jusqu'à Bâle. La Suisse importait surtout des denrées alimentaires et des matières premières (charbon notamment), en grande partie en provenance des colonies, et exportait des produits industriels. Les ports d'Amsterdam et surtout Rotterdam servaient de plaques tournantes pour le trafic de marchandises avec l'outre-mer. Après l'échec d'un premier traité de commerce en 1862 (seule fut ratifiée la convention sur la création de consulats suisses dans les colonies néerlandaises), dû au refus de certains cantons d'accorder aux juifs la liberté d'établissement (obstacle levé pour tous les non-chrétiens en 1866), un traité d'amitié, de commerce et d'établissement fut conclu en 1875. Il a été complété à plusieurs reprises (la dernière fois en 1996).

Pour décharger les consulats et renforcer les relations commerciales, on créa en 1917 les chambres de commerce néerlandaises de Zurich et de Genève, puis une chambre suisse à Amsterdam en 1933. Cependant, la crise économique mondiale incita le gouvernement des P. à prendre des mesures protectionnistes qui affectèrent aussi les échanges avec la Suisse. Après la Deuxième Guerre mondiale, les P. reconstruisirent leur économie avec l'aide du plan Marshall et participèrent activement à l'intégration économique européenne (Communauté européenne du charbon et de l'acier en 1952, Communauté économique européenne et Euratom en 1957). Dans l'après-guerre, les relations entre les P. et la Suisse souffrirent du conflit autour de l'or de la Banque centrale néerlandaise, qui, volé par les nazis, avait été vendu à la Banque nationale suisse pour 562 millions de francs. La restitution de cet or fut réglée en 1946 par l'accord de Washington. Cependant, les P. émirent des prétentions auxquelles ils renoncèrent ensuite pour des raisons de droit international public et par gain de paix.

Investissements directs entre la Suisse et les Pays-Bas 1985-2007
Investissements directs entre la Suisse et les Pays-Bas 1985-2007 […]

Après 1950, le trafic des marchandises sur le Rhin augmenta grâce à de nouvelles infrastructures, adaptées au transport du pétrole brut ou raffiné transitant par Rotterdam. En 2005, 25% des produits pétroliers importés en Suisse et 39% du gas-oil provenaient des P. L'essor des relations économiques se reflète aussi dans la convention de 1951 sur la double imposition (complétée en 1966), l'accord commercial de 1957, l'accord de libre-échange de 1972 entre l'AELE et la CEE, les accords bilatéraux de 1999 entre la Suisse et l'UE. En 2008, les exportations de la Suisse vers les P. ont atteint 6,3 milliards de francs, contre 9 milliards d'importations. En 2007, ses investissements directs aux P. (principalement dans le domaine des banques et assurances, ainsi que dans l'industrie chimique) atteignaient environ 34 milliards, ceux des P. en Suisse (qui à cet égard occupent le premier rang parmi les Etats membres de l'UE), environ 84 milliards.

Relations culturelles

Après 1800, les relations culturelles ne furent plus aussi intenses que par le passé. Cependant, les échanges universitaires continuèrent; les étudiants néerlandais en Suisse fondèrent en 1888 la société Hollandia. La fondation Nederland-Zwitserland (créée aux P. en 1947) et la Société Suisse-P. (1948) restent au début du XXIe s. des lieux de contact culturel. Il existe dans les deux pays des amicales comme la Nederlandse Vereniging (Zurich, Lucerne, Suisse orientale, Genève, Valais, Fribourg), la Vereniging Nederland (Bâle) et la Vereniging De Nederlandse Club au Tessin.

Au XIXe s., le mouvement genevois du Réveil eut une influence aussi sur les Eglises protestantes des P. Des paroisses néerlandaises existent à Bâle (Nederlandse Evangelische Vereniging) et à Genève-Lausanne (Nederlandse Protestantse Gemeente), en étroit contact avec les Eglises suisses. La peinture hollandaise du XVIIe s. (paysages, tableaux de genre), très appréciée des collectionneurs bourgeois, inspira et stimula de nombreux artistes suisses du XIXe s., comme Alexandre Calame, Otto Frölicher et Albert Anker. Après la Deuxième Guerre mondiale, des Néerlandais firent impression en Suisse dans le domaine de la danse et de la performance artistique. Plusieurs créateurs suisses allèrent vivre et travailler aux P., attirés par une atmosphère cosmopolite, une vie culturelle intense et de solides institutions artistiques. En 2003, une manifestation intitulée Surprising Switzerland a permis de présenter à Amsterdam un large panorama de la culture helvétique.

Sources et bibliographie

  • AFS
  • Documentation du DFAE
  • C.J. Benziger, Die Schweiz in ihren Beziehungen zu Holland, [1921]
  • E. Dieterich, Die Bedeutung der Niederlande für die Schweiz im gegenseitigen Handelsverkehr, 1924
  • E. Bonjour, Die Schweiz und Holland in ihren geschichtlichen Beziehungen, 1936
  • Aperçu hist. des relations entre les Pays-Bas et la Suisse, 1969
  • A. Holenstein et al., éd., The Republican Alternative, 2008 (avec bibliogr. sur les relations bilatérales)

Suggestion de citation

Thomas Maissen; Kathrin Marthaler: "Pays-Bas", in: Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 12.10.2011, traduit de l’allemand. Online: https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/003364/2011-10-12/, consulté le 29.03.2024.