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Bischofszellcommune

Comm. TG, chef-lieu de district, au confluent de la Sitter et de la Thur, comprenant la ville de B. sur une terrasse au sud de la Sitter, les quartiers de B.-Nord/Sittertal, l'ancienne commune locale (Ortsgemeinde) de Halden et des parties de celles de Schweizersholz et de Gottshaus (Stocken). 1155 Bischoffescella. A l'époque où elle relevait de l'évêque de Constance, la ville jouait un grand rôle, à cause de ses ponts et de sa situation à la frontière de la principauté abbatiale de Saint-Gall. Depuis le XIXe s., ce chef-lieu de district, industrialisé, mais à l'écart des grandes voies de communication, a une vocation plutôt régionale. Env. 550 hab. en 1634, env. 950 en 1773, 923 en 1831, 1303 en 1850, 2114 en 1880, 2618 en 1900, 3192 en 1910, 3567 en 1950, 3990 en 1980, 5421 en 2000 (avec Halden 269 hab. et Schweizersholz 290 hab.).

Incendie de la ville le 17 mai 1743. Eau-forte de David Herrliberger (Zentralbibliothek Zürich, Graphische Sammlung und Fotoarchiv).
Incendie de la ville le 17 mai 1743. Eau-forte de David Herrliberger (Zentralbibliothek Zürich, Graphische Sammlung und Fotoarchiv). […]

Un tumulus du Bronze, quelques vestiges romains et alémanes, ainsi que des documents du haut Moyen Age attestent une colonisation ancienne. On suppose que l'évêque de Constance Salomo Ier fonda au IXe s. le chapitre de chanoines de Saint-Pélage, à côté d'une cour seigneuriale existante. Au Moyen Age, le quartier du Hof (comprenant la cour seigneuriale, le chapitre, l'église, le château fort, ainsi que des maisons franches) fut entouré de remparts. Vers 1250, B. prit de l'importance parce que l'évêque de Constance l'utilisa comme avant-poste contre l'abbé de Saint-Gall et que le bourg abritait un marché (foire attestée en 1269). En 1273, les seigneurs de Montfort s'en emparèrent et l'incendièrent. Au XIIIe s. le quartier du marché, précurseur de la ville, situé à l'est du Hof, fut protégé par une enceinte. C'est là que se trouve aujourd'hui l'hôtel de ville, construit entre 1747 et 1750 par Giovanni Gaspare Bagnato et rénové en 1977-1980. Cet édifice remplaçait un bâtiment de 1626-1629, détruit en 1743 par un incendie en même temps que 70 autres maisons. Le faubourg, seconde extension urbaine dont l'existence est attestée depuis 1360, abritait les activités économiques bruyantes, malodorantes et comportant un risque d'incendie. Détruit vers 1405 pour des raisons militaires, il ne fut reconstruit qu'en 1437 et entouré de murailles. Jusqu'au XVIIIe s., B. ne se développa pas hors de ses murs, mis à part le cimetière, déplacé en 1544-1545.

La ville ne dépendait pas du chapitre, mais de l'évêque de Constance. Le bailli épiscopal, attesté dès 1276, résidait au château. Cet édifice, remis en état après l'incendie de 1419, subit d'importantes transformations aux XVIIe  et XVIIIe s.; propriété du nouveau canton de Thurgovie en 1798, qui le vendit en 1811, il appartient à la commune depuis 1930. L'aile ouest s'effondra vers 1838, le donjon fut démoli en 1843. La première administration communale est attestée par le sceau de la ville, datant de 1338 (une main gantée tenant la crosse épiscopale) et la charte de 1350. Les difficultés financières de l'évêque profitèrent aux bourgeois, qui aspiraient à l'autonomie et purent racheter divers droits, car la ville fut souvent hypothéquée au XIVe s. Le bailli présidait le Conseil de ville (12 membres), et rendait, avec les deux premiers conseillers, la haute justice, qui appartint à la ville de 1485 à 1798. Les ressorts de haute et de basse justice ne se recouvraient pas entièrement: la ville exerçait la basse justice sur les environs, mais lorsque les Confédérés s'emparèrent de la Thurgovie en 1460, leur bailli obtint une partie de cette basse justice ainsi que le droit de haute justice sur l'hôpital du Saint-Esprit, fondé par les bourgeois en 1369. Après la Réforme, Zurich s'érigea en puissance protectrice de la population protestante majoritaire, et s'opposa aux prétentions de l'évêque. A la suite d'une série d'alliances complexes, c'est la Confédération qui désigna notamment le bailli dès 1587, même si le prince-évêque resta seigneur de la ville jusqu'en 1798.

Au spirituel, B. releva d'abord de Sulgen, dont la collation appartenait au chapitre de Saint-Pélage. La paroisse fut érigée en 1269. La collégiale Saint-Pélage, reconstruite au XIVe s. sur des fondations du IXe s., était aussi paroissiale. Sous l'influence de Zurich, la Réforme triompha en 1529, mais la célébration de la messe fut à nouveau autorisée en 1535. La prébende de la cure fut partagée en 1536 et en 1563. Dès 1728, toutes les charges municipales furent occupées à égalité par les protestants et les catholiques. L'une et l'autre paroisses englobaient Hauptwil, Gottshaus et Halden, ainsi qu'une partie de Hohentannen et de Schweizersholz. L'annexe protestante de Hauptwil fut fondée en 1861. Une partie de Gottshaus se sépara en 1908 pour constituer la paroisse catholique de Sankt Pelagiberg. L'église de B., transformée à l'époque baroque, fut utilisée par les deux communautés jusqu'à la construction de l'église réformée Saint-Jean en 1968. L'école du chapitre, qui était réputée, périclita après la Réforme. Une école protestante fut créée en 1530. Projetée en 1536, l'école catholique, n'ouvrit ses portes qu'en 1660; d'abord administrée par le chapitre, elle passa sous le contrôle de la ville vers la fin du XVIIIe s. L'enseignement fut pris en charge par l'école secondaire en 1834. Les deux écoles confessionnelles furent réunies en 1870.

Vue perspective sur Bischofszell, d'après un dessin de 1770 copié en 1890 par Ferdinand Corradi (Museum Bischofszell).
Vue perspective sur Bischofszell, d'après un dessin de 1770 copié en 1890 par Ferdinand Corradi (Museum Bischofszell).

Les ponts en bois franchissant la Thur (vers 1300) et la Sitter (attesté dès 1428) furent remplacés par des ouvrages en pierre vers 1500. Grâce à ces ponts, francs de douane jusqu'en 1796, B. devint un lieu de transbordement pour le commerce textile, concurrent sérieux de Saint-Gall et des centres toiliers de la région du lac de Constance aux XVe et XVIe s. Les établissements commerciaux des familles Rietmann, Bridler, Daller et Zwinger, spécialisés dans les échanges à longue distance, florissaient aux XVIIe et XVIIIe s. La production textile locale, en revanche, n'avait sans doute guère d'importance. Les artisans protégèrent leurs intérêts en promulgant des décrets restrictifs (ordonnance sur les métiers de 1699, en l'absence de corporations); à l'exception des potiers, leur production était destinée à la clientèle purement locale qui fréquentait le marché de B.

Commune des plus riches sous l'Ancien Régime, B. le fut aussi dans le canton de Thurgovie, après les troubles de l'Helvétique, avivés par l'obstination du prince-évêque de Constance à défendre ses droits seigneuriaux. Le domaine d'Engishalden et les hameaux de Winklen, Moosburg, Muggensturm, Klausenhäusli, Katzensteig et Im Stich lui furent intégrés en 1812. A côté de l'ancienne commune bourgeoise, la municipalité apparut en 1799/1803 et la commune locale (Ortsgemeinde) en 1834. Ces trois entités avaient le même territoire; les deux dernières fusionnèrent en 1870. La commune bourgeoise subsiste comme corporation de droit public; elle a vendu ses bâtiments (dont l'hôtel de ville et l'école secondaire) et donné environ un tiers de sa fortune pour le développement local et pour la construction de la ligne Sulgen-B.-Gossau (SG), ouverte en 1876. Cette voie ferrée et le recours à l'énergie hydraulique furent certainement décisifs pour l'industrialisation. La fabrique de jacquard Niederer (1856-1911) fit place à la fabrique de papier Laager ("Papieri Bischofszell"), en service jusqu'en 1984. Vers 1910, deux dentelleries occupaient plus de 200 personnes. Mentionnons par ailleurs la première imprimerie thurgovienne fondée par Andreas Wehrli en 1792, la Bischofszeller Zeitung, parue dès 1860 puis dès 1872 sous ce nom, et la fabrique de confection sur mesure Munz, créée en 1870. Les industries du XIXe s. s'installèrent à proximité des ponts (aux lieudits Brüel et Bleiche). Le développement de la zone industrielle B.-Nord/Sittertal débuta avec la cidrerie coopérative Obi (1906) et la conserverie Tobler (1909), rachetée par la Migros en 1945 et dont les quelque 700 employés contribuaient à faire pencher dans un sens positif la balance des travailleurs pendulaires de B. dans les années 1990. Sous l'effet de l'immigration, la proportion des protestants diminua au XXe s. (61% en 1870, 55% en 1910, 40% en 1990). L'éventail politique se modifia dès l'introduction du scrutin proportionnel, le PDC (ou ses prédécesseurs) et le PRD, presque à égalité, étant suivis par le PS.

Le réseau d'eau potable dès 1893 et d'électricité dès 1908, la production indépendante de gaz de 1903/1908 à 1959 et la station d'épuration construite en 1973 améliorèrent les infrastructures. La ville s'étendit d'abord sur ses terrasses orientales; puis de nouveaux quartiers d'habitation apparurent dès 1945-1946 au nord de la Sitter ("village Obi", villas sur la pente du Lättehang et le long des routes de Sitterdorf et de Sulgen). Après de nombreux départs dans les années 1970, B. enregistra à nouveau un net accroissement démographique dans les années 1990.

Sources et bibliographie

  • Arch. de Munz et Laager, StATG
  • T. Bidler, «Der Leinwandhandel, eine ehemals blühende Industrie in Bischofszell», in Thurgauer Jahrbuch, 6, 1930, 10-18
  • MAH TG, 3, 1962, 23-357
  • A. Knoepfli, Des Thurgaus erste Druckerei zu Bischofszell 1792-1800, 1986
  • A. Hefti, Bischofszell in seinem Wandel von 1876 bis heute, ms. institut géogr. de l'université de Zurich, 1992
  • A. Knoepfli, B. Sendner-Rieger, Bischofszell - Kunst, Kultur, Geschichte, 31994
  • Episcopaliscella: vom Stift zur Stadt, 2000
Liens
Notices d'autorité
GND

Suggestion de citation

Gregor Spuhler: "Bischofszell (commune)", in: Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 10.08.2004, traduit de l’allemand. Online: https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/001865/2004-08-10/, consulté le 19.03.2024.