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Subventions

Par subventions, on entend des prestations en espèces versées par une collectivité publique à des tiers dans un but politique précis. Les formes et conditions en sont très diverses (contributions, aides financières, subventions d'investissement, compensations, indemnités, primes, participation aux coûts, aides à l'exploitation, allocations pour frais financiers, prêts, bourses, subsides). Il existe une vaste palette de systèmes de subventions. Le montant des prestations (versements à fonds perdus, prêts, garanties, allègements fiscaux) peut être forfaitaire ou calculé au pourcentage des coûts, en tenant compte éventuellement de la capacité économique du bénéficiaire ou de versements de tiers. En Suisse, des subventions sont octroyées au niveau de la Confédération, des cantons et des communes. Selon le compte d'Etat, les subventions représentaient plus de la moitié des dépenses de la Confédération en 2009. La part du lion revient à la prévoyance sociale (46%), suivie des transports (17%), de la formation et de la recherche (15%) et de l'agriculture (11%). Les subventions constituent ainsi un élément structurel essentiel de l'Etat fédéral.

Dans la Constitution fédérale de 1848, il n'était question de subventions qu'à l'article 21 qui habilitait la Confédération à soutenir des travaux publics intéressant la Suisse (construction de routes et corrections de cours d'eau surtout). Dès les années 1850, les cantons de montagne (Uri, Grisons, Tessin et Valais) reçurent des subventions fédérales pour le financement de la construction des routes par les principaux cols. Dans les années 1860, on décida de subventionner les travaux de correction du Rhône, du Rhin et des eaux du Jura. D'autres subventions furent ensuite octroyées pour les chemins de fer (1871), la formation professionnelle (1884), l'agriculture (1893), la santé publique (1897) et les écoles primaires (1902). De 1848 à 1914, les subventions fédérales servirent à compenser les insuffisances de l'Etat fédéral. Le subventionnement était un excellent moyen d'empêcher l'étatisation. A partir de 1935, sous l'effet de la crise économique mondiale, d'importantes contributions furent versées pour soutenir l'industrie d'exportation (hôtellerie, textile, horlogerie, garantie des risques à l'exportation) et pour sauver la Banque populaire suisse en 1936 (réglementation du marché).

L'Etat fédéral consacra une part croissante de ses dépenses (elles-mêmes en augmentation) aux subventions: 4,4% en 1870, 24% en 1910, 30% (record provisoire) en 1936. Cette croissance s'explique par trois raisons: la recherche indispensable d'un équilibre entre villes et campagnes, la nécessité de développer la sécurité sociale et les appels adressés à l'Etat pour qu'il intervienne dans la politique économique. La situation des finances fédérales, favorisée par l'évolution du revenu des douanes, et meilleure que celle des cantons, dont les budgets étaient grevés par le développement des activités de l'Etat et par l'insuffisance des recettes fiscales, est un autre facteur qui contribua à l'augmentation des subventions (Finances publiques).

Après la Deuxième Guerre mondiale, on créa l'assurance vieillesse et survivants (1948) et l'assurance invalidité (1960), dont le financement provient pour une bonne part de subventions fédérales. Depuis l'inscription du principe de la péréquation financière dans la Constitution fédérale en 1958 (art. 41ter et 42ter, art. 135 de la Constitution de 1999), les subventions versées aux cantons l'ont été de plus en plus au titre de compensation des charges entre cantons d'inégale capacité financière. Le subventionnement est une condition du fonctionnement de l'Etat fédéral, et sans une part importante de subventions de la Confédération, la réalisation de grands projets nationaux, comme, dès les années 1960, la construction des routes nationales ou l'épuration des eaux, n'aurait pas été possible. Les taux de subventionnement furent en partie différenciés en fonction de la capacité financière des cantons (afin de soutenir particulièrement les plus faibles).

L'augmentation du volume des transferts de la Confédération aux cantons n'a pas suffi à réduire les disparités financières entre ces derniers. Dans les années 1980, les directions cantonales des finances s'élevèrent de plus en plus contre un système qui reléguait les cantons au rang d'organes d'exécution de la Confédération. Ces critiques aboutirent, au début des années 1990, au projet de réforme de la péréquation financière et de la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons (RPT), qui devint rapidement un chantier commun de tous les intéressés. Largement acceptée par le peuple en 2004, cette réforme acheva de se concrétiser dans les législations fédérale et cantonales au 1er janvier 2008. La RPT entraîna la séparation de tâches jusqu'alors communes ou leur attribution soit à la Confédération (comme les routes nationales), soit aux cantons (par exemple les institutions de prise en charge des handicapés). Depuis lors, la péréquation financière et la compensation des charges entre cantons à forte ou faible capacité financière, ainsi qu'en faveur des cantons de montagne ou assumant des fonctions de centre, est fixée tous les quatre ans par les Chambres fédérales sous la forme de versements compensatoires sans affectation définie. De nouveaux instruments de collaboration ont été créés pour les tâches qui restent communes (par exemple les forêts, la protection de la nature et du paysage). D'autre part, les subventions existantes sont soumises depuis 1990 à une loi fédérale qui oblige à vérifier périodiquement si elles sont nécessaires et si elles permettent d'atteindre le but visé de manière économique et efficace.

Sources et bibliographie

  • D. Schindler, Die Bundessubventionen als Rechtsproblem, 1952
  • Réexamen général des subventions fédérales, 1966
  • R.A. Rhinow, Wesen und Begriff der Subvention in der schweizerischen Rechtsordnung, 1971
  • «Message du Conseil fédéral à l'appui d'un projet de loi sur les aides financières et les indemnités», in Feuille fédérale de la Confédération suisse, 1987, 369-468
Liens

Suggestion de citation

Alfred Rey: "Subventions", in: Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 03.12.2013, traduit de l’allemand. Online: https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/013761/2013-12-03/, consulté le 29.03.2024.